Tome 1 – Écrits 1956-1961

L’Observatoire de Cannes
et autres écrits 1956-1961

Ce premier tome permettra tout d’abord de découvrir les premiers textes “surréalisants” que le tout jeune Jean Ricardou fait paraître dans L’Herne. La rareté de beaucoup des textes rassemblés — comme les premières critiques publiés dans La Nouvelle Revue Française — les fait confiner à l’inédit et constituer, même pour les connaisseurs, une véritable révélation.

Ce premier tome permettra, par ailleurs, de relire L’Observatoire de Cannes, premier roman de Jean Ricardou qu’il présentait ainsi à sa sortie, en 1961, aux éditions de Minuit:

L’Observatoire de Cannes est ce belvédère cons­truit au sommet de l’une des collines qui entourent la ville. On y accède par un funiculaire.

La lente ascension du véhicule, qui, tout en rap­prochant de l’objectif fixé, fait tomber successivement tous les obstacles à la vue, et dénude, peu à peu, les divers secteurs du paysage, constitue la représentation assez exacte du mouvement du livre, ce progressif dévoile­ment, dans un train, sur la plage, parmi les mimosas ou dans la mer, du corps bronzé d’une jeune étrangère.

Les différentes étapes de cette mise à nu d’un corps et de l’espace, situées en différents moments du temps, se recomposent selon la temporalité même de la lecture.

Et, plutôt que par une juxtaposition linéaire, cha­cune de ces étapes s’insère dans le mouvement d’ensemble en le mimant, en le traduisant au niveau du moindre détail, comme un microcosme, par le jeu continuel des correspondances entre formes, nom­bres, couleurs, mouvements, gestes…, par les vertus de l’écriture même — mots à multiples ententes, semi-homonymes, ordre des vocables, rythme des proposi­tions, etc. —, le rendant toujours présent.

Le réel n’est ni le simple monde extérieur, ni le pur phantasme, mais la résultante de l’un et de l’autre, leur exacte confluence, qu’une écriture descriptive, telle qu’on vient de la définir, se propose de mettre à jour, à chaque instant.

Une introduction de Marc Avelot détaille la “véritable métamorphose“ à laquelle permet d’assister la lecture de ce tome 1.

Extraits de l’introduction

C’est simultanément, sur un plan théorique et pratique, que Jean Ricardou accomplit sa révolution, qui tourne autour de la description.

Sur le plan théorique, donc, avec une étude consacrée au travail d’Alain Robbe-Grillet, mais non moins avec les analyses fouillées qu’il mène sur deux textes de Claude Ollier, Le maintien de l’ordre et Description panoramique d’un quartier moderne. Loin des formulations expéditives distillées par l’auteur de Pour un nouveau roman dans L’Express, l’ensemble formé par les articles “Aventures et mésaventures de la description”, “Aspects de la description créatrice” et “Description et infraconscience chez Alain Robbe-Grillet” fournit à la recherche scripturale un socle conceptuel très solide.

Recherche scripturale, en effet, puisque Jean Ricardou se lance parallèlement dans l’écriture d’un texte qui expérimente une nouvelle pratique de la description et qui deviendra “Sur la pierre”. Ce texte est si déterminant que Jean Ricardou le considérait comme le véritable point de départ de son œuvre, suggérant même qu’on supprime tous ceux qui l’avaient précédé.

C’est en tout cas à la lumière des acquis de ce texte qu’il entreprend l’élaboration d’un roman tout à fait singulier, L’Observatoire de Cannes, qui paraîtra en 1961.

Mais le caractère éminemment stratégique de la description, c’est peut-être dans l’écrit qui clôt ce volume que Jean Ricardou le fait saillir avec le plus d’acuité. Répondant à l’enquête que la revue Premier plan mène auprès des “rares romanciers qui peuvent prétendre au titre d’écrivains modernes“, Jean Ricardou n’hésite pas à avancer:

La peinture est devenue peinture moderne quand elle a acquis un statut purement pictural (Colette Audry, elle, l’a bien compris), quand elle s’est libérée de l’anecdote. Pour elle l’anecdote était l’image – visages, objets, paysages – ces modèles, ce développement antérieur à son exercice. Pour le roman l’anecdote n’est nullement l’image, mais l’intrigue – d’un mot: la temporalité des événements et la nette démarcation du vécu et de l’imaginaire – ce développement composé avant l’acte d’écrire, cette création avant la création. Accomplissant à son tour sa révolution, c’est l’intrigue a priori, et non l’image, que le roman moderne, pour donner les pleins pouvoirs créateurs à l’écriture, tend à expulser.

Ainsi, Jean Ricardou dispose-t-il une analogie, c’est-à-dire un rapport de rapports: l’intrigue est au roman ce que l’anecdote est à la peinture. Toutefois, en précisant que par anecdote il faut entendre “visages, objets, paysages“, il met en œuvre une sorte de paradoxe: quand la modernité picturale consiste à expulser les objets, la modernité scripturale pourrait bien tenir dans leur exploration.

Toujours est-il que ce jeu chiasmatique entre la peinture et l’écriture puis, à l’intérieur même de l’écriture, la belligérance du récit et de la description, Jean Ricardou ne va plus cesser de les travailler, “accomplissant à son tour sa révolution“.

Table des matières

L’Observatoire de Cannes

Écrits

La loterie
Rue Mademoiselle
Les souffre-douleur
La chaise
Sur la pierre
Un ordre dans la débâcle
Description et infraconscience chez Alain Robbe-Grillet
Description d’un strip-tease
Lancement d’un voilier
Premières lectures du Parc

Notes de lecture

Textes de jeunesse

Format (en mm) : 170 x 240
Présentation : Broché
Nombre de pages : 312

ISBN : 978-2-87449-597-7

Prix public TTC : 24 euros

portrait Jean Ricardou - integrale 1